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Je me souviens de la hantise des rédactions au collège, où, inexorablement, j'appuyais sur le petit bouton de mon stylo à la recherche de l'inspiration…


Je me souviens de l'annonce de la mort de Claude François. On m'avait dit qu'il s'était séché les cheveux dans sa baignoire. Cette image du sèchecheveux, bien qu’erronée, -j'ai appris par la suite qu'il avait changé une ampoule les mains mouillées- me colle à la peau, ou plutôt aux cheveux, dès que je l'utilise.
Je me souviens du passage de la gauche en France en 1981. Il manquait quelques mois avant que je n'atteigne la majorité. Je n'avais donc pu voter, mais plusieurs d'entre nous, élèves de terminale, avaient eu ce privilège.


Je me souviens -ô doux souvenir- de la file d'attente devant le bureau en bois de la maîtresse pour avoir droit à la griffure sur le bras de la cuti.


Je me souviens du trajet pour aller au conservatoire de musique du 15ème arrondissement de Paris. Il faisait nuit, j'étais accompagnée par ma mère, et, tenant, le cœur serré, la poignée de l'étui noir et rigide qui abritait mon violon demi, je franchissais les grilles du bâtiment en tremblant, sachant que j'allais devoir affronter les sautes d'humeur de cette vieille folle de professeur qui balançait d'un geste brusque nos archets à l'autre bout de la pièce. Comble de l'ironie : elle s'appelait Madame Boucherie...
 

Je me souviens de l'explosion de joie en lisant sur la liste des résultats du baccalauréat général : « reçue avec mention... ».

Isabelle
 

         Avec ma sœur nous venions d'arriver dans une famille bretonne, nous avions été installées dans la chambre du grand père lequel sera remisé au grenier le temps de notre présence. Nous sommes dans l'attente extrême de voir la mer qui, nous a-t-on dit, n'est pas loin. Dépassé le village, serré autour de son église, nous marchons en espadrilles toutes neuves dans la bruyère rase et d'un rose violacé que j'aime, nous sommes légères et excitées d'être hors de la région parisienne.

           

            Le terrain devint sableux parsemé de végétation agrippante, puis la dune s'affaisse et ce fut le coup au coeur, la mer, la mer tant de fois imaginée, la mer là, enfin presque, parce que, devant nous est une étendue miroitante sous le soleil, immobile, seul le jeu de la lumière l'anime. Au loin un léger mouvement blanc, la mer est là-bas.

 

            Nous tenant par la main, nous courons, étonnées de sentir nos pieds s'enfoncer dans le mouillé, rapidement nos espadrilles gonflées d'eau nous pèsent. La mer n'est pas encore atteinte, la marée basse l'a retirée à l'extrême, mais que c'est beau, que c'est beau ! A bout de souffle, nous touchons l'écume, cette  dentelle éphémère qui nous accueille. Nous venons de prendre vie dans cette immensité.

           

            Plus tard, au lycée, une professeur de français nous dira sa première vision de la mer et dans son enthousiasme et son émotion je retrouvai intact ce moment de rencontre.

                                                                                                                                                                                                                                 Simone

 

 

                                                                                                         

Souvenirs, souvenirs...

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